La convocation au poste de police, pour se soumettre à un interrogatoire (courtois ou musclé – selon la situation), avec M. le commissaire et ses inspecteurs, est une situation très fréquente dans de nombreux films policiers.

Inventer le décor correspondant semble être la chose la plus facile du monde : un bureau aux couleurs ternes (blanc cassé ou beige pour les murs), du mobilier usé et un peu démodé, un ou deux téléphones à cadran, des classeurs qui s’entassent, une lumière tamisée, neutre ou crue (selon le degré du suspens, en utilisant la fameuse lampe qui éblouit le suspect) … et le tour est joué – le commissaire (Enrico Mario Salerno) peut commencer l’interrogatoire !

Mais ces offices des forces de l’ordre seront incomplets sans un détail déterminant qu’on retrouve à chaque fois et qui à lui seul identifie les lieux : l’indispensable plan de la ville affiché au mur, derrière ou à côté du bureau du commissaire (Herbert Lom).

Elément essentiel et immuable, il démontre la primauté de la cartographie de la ville pour dénicher le crime. Il permet aux enquêteurs André Gabriello et Albert Préjean de s’orienter dans la jungle urbaine.

Le plan est aussi une métaphore des mystères de l’enquête, un labyrinthe dans lequel le commissaire (François Périer) se déplace mentalement en essayant de ne pas se perdre.

Si le commissaire (Gian Maria Volonté) connaît sa ville comme sa poche, c’est aussi grâce à sa carte, collée au mur, dont il a étudié chaque arrondissement, chaque recoin, chaque carrefour… qu’il domine souverain et impassible.

Même si, très curieusement, on peut aussi trouver un plan de New York dans un poste de police parisien ! Pas d’erreur grossière de la part du flic (Alain Delon), mais simple clin d’oeil de Melville qui rend hommage dans un policier français au film noir américain …

… Tout comme Xavier Beauvois qui embellit le bureau tristounet d’autres flics parisiens (Jalil Lespert, Nathalie Baye, Roschdy Zem), non seulement avec le plan de Paris de rigueur (le lieu de l’action), mais aussi avec une affiche du film « Il était une fois en Amérique », de Sergio Leone.

Si les exemples précédents ne concernent que des films qui se déroulent à Paris et Rome, on consultera des cartes de toutes les grandes villes dans les films policiers, dès qu’on se trouvera dans un commissariat. Le plan de Los Angeles est visible derrière l’inspecteur (Lance Hendriksen), juste avant que le Terminator (Arnold Schwarzenegger) ne saccage les lieux …

… Et on peut même trouver des plans de villes imaginaires comme l’étonnant Ennui-sur-Blasé et ses environs – qui encadre magnifiquement rétroéclairé l’acteur Jeffrey Wright, dans un film américain qui rend hommage au film policier français !

Peu importe la cité, chaque policier (Anjana Vasan, Hugh Skinner, Paul Chadhidi) contemple son plan avec perspicacité : il sait déjà que le lieu du crime, c’est la ville !
(… à suivre)
Une réflexion sur “Un plan presque parfait !”